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A l’heure du télétravail et du confinement retrouvé, nombreux sont les enfants qui prennent leur goûter à la maison… non loin de leurs parents. Si certaines familles ont profité de ces nouvelles conditions pour élaborer un quatre-heures plus équilibré, pour d’autres, ce moment peut être source de tensions. Si c’est votre cas, deux études que j’ai publiées récemment peuvent vous donner des arguments et des astuces pour inciter les enfants à modérer d’eux-mêmes leur envie de goûters trop riches en calories.

Dans un monde idéal, le goûter à la maison devrait permettre de remplacer les biscuits et autres pâtisseries industrielles par des fruits. Mais quand on sait que seulement 23% des enfants âgés de 6 à 17 ans consomment les cinq fruits et légumes recommandés par jour, il est évident que, pour beaucoup, le goûter comprend des aliments riches en calories – à consommer donc avec modération.

Brownie et compote

Le problème est que peu d’enfants se satisfont spontanément de la portion recommandée, qui est étonnamment petite pour des goûters à forte densité calorique. Pour un brownie, par exemple, la portion recommandée est de seulement 30 grammes (soit 142 kilocalories), c’est-à-dire presque trois fois moins que les brownies de McDonald’s (qui contiennent 372 kilocalories chacun).

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Pourtant, il est possible d’aider les enfants à réaliser que choisir un goûter modéré est non seulement bénéfique pour leur santé, mais aussi le meilleur choix qu’ils peuvent faire du strict point de vue du plaisir qu’ils auront à le déguster.

C’est ce que démontrent les deux études que j’ai menées avec Yann Cornil, professeur de marketing à l’université de la Colombie-Britannique à Vancouver, et Camille Schwartz, Christine Lange, Célia Hachefa et Sophie Nicklaus, un groupe de chercheurs du Centre français des sciences du goût et de l’alimentation à Dijon.

Petite portion, petit plaisir ?

Dans la première étude, nous avons demandé à 83 enfants, âgés de 8 à 11 ans, d’anticiper le plaisir qu’ils ressentiraient après avoir consommé différentes quantités de brownie ou de compote de pommes. Nous leurs avons également demandé d’estimer s’ils auraient encore faim après chaque portion et si ces portions étaient bonnes pour la santé. Ils ont répondu à ces questions pour trois portions : celle recommandée pour leur âge, une portion 50% plus grande et une portion 125% plus grande. Plus tard, au cours de six autres sessions, les enfants ont répondu aux mêmes questions mais, cette fois, après avoir mangé une des trois portions de ces deux goûters. Les résultats ont été publiés dans « The International Journal of Behavioral Nutrition and Physical Activity ».

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Les prédictions des enfants se sont avérées extrêmement justes lorsqu’il s’agissait d’anticiper leur niveau de faim après avoir mangé chaque portion, niveau qui diminuait sans surprise au fur et à mesure que la taille de la portion augmentait.

En revanche, ils ont mal anticipé les effets de la taille de la portion sur le plaisir. Comme le montre la figure ci-dessous, ils pensaient qu’ils apprécieraient davantage les grandes portions que les petites. En réalité, ils ont autant apprécié la grosse portion que la moyenne ou que la plus petite. En conséquence, les enfants ont sous-estimé à quel point ils apprécieraient en réalité la plus petite portion, qui est la taille de portion recommandée.

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En ce qui concerne les perceptions de santé cette fois, les résultats étaient tout à fait différents : les enfants savaient pertinemment que la compote de pommes est un goûter plus sain que le brownie. En revanche, ils ont été totalement insensibles à la taille de la portion, estimant que consommer un brownie de 71 grammes n’est pas pire pour la santé qu’en consommer un de 32 grammes. Ces résultats confirment donc que, pour les enfants encore plus que pour les adultes, le bénéfice santé lié à leur alimentation dépend davantage de la qualité des aliments que de la quantité consommée.

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L’imagerie sensorielle à l’œuvre

La raison pour laquelle le plaisir dépend peu de la taille de la portion est que le plaisir total à la fin d’un plat n’est pas la somme du plaisir ressenti à chaque bouchée, mais sa moyenne . Or chaque bouchée supplémentaire ajoute un peu moins de plaisir que la précédente. Lorsqu’on consomme une grosse portion, de gâteau au chocolat par exemple, les dernières bouchées sont écœurantes et font donc baisser la moyenne. C’est d’ailleurs pour cela qu’on les regrette souvent.

Pourtant, lorsque nous devons choisir entre une petite et une grande portion, nous avons tendance à nous concentrer sur notre faim et à négliger le plaisir. Pour replacer le plaisir au centre de la décision, nous avons donc élaboré une technique, appelée imagerie sensorielle, qui est facile à utiliser avec les enfants. Nous avons montré, dans une étude publiée dans la revue « Appetite », que l’imagerie sensorielle peut aider à inciter les enfants à choisir d’eux-mêmes des goûters meilleurs pour la santé, c’est-à-dire une portion raisonnable de gâteau et une bonne portion de fruits.

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Les cinq sens en éveil

Dans cette seconde étude, réalisée à l’école primaire pendant le temps péri-scolaire, les enfants avaient le choix entre trois quantités de brownie et de compote. La petite taille, celle recommandée, était de 100 grammes de compote et 32 grammes de brownie. Comme dans l’étude précédente, la portion moyenne était 50% plus grande que la petite et la grande portion était 50% plus grande que la moyenne.

Un groupe d’enfants a suivi les instructions d’imagerie sensorielle. Nous leur avons montré trois images de desserts appétissants et nous les avons encouragés à utiliser leurs cinq sens pour imaginer les multiples saveurs, arômes et textures de ces desserts. Nous avons montré au groupe témoin des images de différents lieux de vacances et nous leur avons demandé d’utiliser leurs cinq sens pour imaginer les odeurs, les sons et les sensations qu’ils ressentiraient dans ces lieux.

Alors que tous les enfants avaient faim ou très faim, les enfants du panel « imagerie sensorielle alimentaire » ont choisi de plus petites portions de brownies que ceux du panel « témoin ». Cette réduction (de l’ordre de 7%, soit 22 kilocalories en moins), bien que peu élevée, est statistiquement significative et elle est entièrement due aux choix des enfants, sans contrainte ni grand discours. Autre bonne nouvelle, l’imagerie sensorielle n’a pas réduit la quantité de compote choisie par les enfants, qui est l’un des aliments les moins caloriques pour le goûter. En mettant l’accent sur le plaisir de la dégustation, l’imagerie sensorielle a donc incité les enfants à opter pour un goûter avec un peu moins de brownie, mais tout autant de fruits.

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Priorité à la qualité

Nous avons tous tendance à nous concentrer sur ce que nous mangeons plutôt que sur la quantité que nous absorbons, alors que les deux sont importants. C’est la raison pour laquelle il est souvent plus facile de modifier les quantités consommées que le choix des aliments. Aider les enfants à réaliser que la quantité n’est pas forcément gage de plaisir peut être une approche pour aider les enfants à manger avec davantage de modération, que ce soit à l’heure du goûter ou à d’autres moments de la journée. Et ce qui est valable pour les enfants l’est évidemment également pour les parents.

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